Sans attention, aucun apprentissage n’est possible

En neurosciences cognitives, l’attention est définie comme “l’ensemble des mécanismes par lesquels notre cerveau sélectionne une information, l’amplifie , la canalise et l’approfondit”¹. Il existe essentiellement 3 systèmes attentionnels :

Le système d’alerte nous dit quand faire attention. C’est un signal qui mobilise l’ensemble de l’organisme lorsque le contexte l’exige, par exemple lorsqu’un événement que nous percevons comme dangereux survient ou encore lorsqu’une émotion forte nous submerge.

Le système d’orientation détermine à quoi nous devons prêter attention. Il nous permet de sélectionner, parmi les millions de stimulations qui se présentent à nos sens, celle que nous jugeons la plus pertinente afin d’y attribuer nos ressources cognitives.

Le contrôle exécutif détermine comment les informations sélectionnées doivent être traitées. Il s’agit d’un ensemble complexe de processus cognitifs qui nous permettent de choisir un plan d’action et de nous y tenir. Par exemple, lors d’une opération mathématique, c’est notre système de contrôle exécutif qui établit la série d’opérations mentales à effectuer pour obtenir le résultat.

Sans l’activation de ces 3 systèmes, il devient donc impossible de percevoir, de sélectionner et de mémoriser les informations pertinentes et nécessaires à l’apprentissage, ainsi que les stratégies à mettre en place pour les traiter.

En formation, si l’attention des apprenants n’est pas captée, il n’y a alors aucune chance qu’ils apprennent les messages clés !

Les capacités attentionnelles ne sont pas illimitées !

L’attention des apprenants étant indispensable à l’apprentissage, celle-ci est constamment sollicitée.

Malheureusement nos ressources attentionnelles sont limitées. En effet, des études ont montré qu’au début d’une séance de formation, l’attention de l’apprenant augmente pendant 10 minutes environ, puis diminue jusqu’à la conclusion durant laquelle l’attention va de nouveau croître.

Les capacités attentionnelles varient également selon le moment de la journée. D’après Christina Schmidt, chercheuse en psychologie et cognition à l’université de Liège, les deux moments de la journée propices à des apprentissages à fort coût cognitif seraient la fin de matinée et la fin d’après midi.

Enfin, contrairement à la croyance populaire, notre cerveau n’est pas multitâche. Si nous devons faire deux tâches en même temps, nous ne pourrons nous concentrer que sur une seule d’entre elles. C’est le passage très rapide d’une tâche à l’autre, qui crée cette illusion. 

Cependant, lorsqu’une tâche a été automatisée, il devient alors possible d’effectuer une deuxième tâche en parallèle. Par exemple, lorsque nous conduisons, nous pouvons discuter avec une personne, tout en passant les vitesses de façon automatique.

// Comment faire avec ces limites ?

  • Limitez les activités à mener en parallèle pour que l’apprenant puisse se concentrer sur l’objectif pédagogique.
  • En auto-formation, adoptez le microlearning !
  • En temps synchrone, proposez régulièrement des pauses et variez le rythme.
  • Sensibilisez vos apprenants aux limites de leurs ressources attentionnelles et comment les réapprovisionner.

La motivation déclencheur de l’attention

La motivation peut se définir comme un processus qui détermine « le déclenchement, la direction, l’intensité, et la persistance du comportement ». C’est la motivation qui confère aux stimulis une valeur attentionnelle et détermine leur pouvoir de capter l’attention.

Il existe deux composantes à la motivation :

  • L’intérêt pour la connaissance ou l’activité qui peut être suscitée par la nouveauté, la complexité ou l’incongruité.

  • La croyance de l’apprenant en sa capacité à intégrer cette connaissance ou à réaliser cette activité.

La motivation peut être intrinsèque ou extrinsèque à l’apprenant :

La motivation intrinsèque est guidée par la curiosité, le plaisir, etc.

La motivation extrinsèque est guidée par des circonstances extérieures : récompenses, punitions, répondre aux attentes d’une tierce personne, etc.

À tâche équivalente, l’effort attentionnel est-il le même selon que la motivation de l’apprenant soit intrinsèque ou extrinsèque ?

La réponse est non. Si la motivation est extrinsèque la tâche sera perçue comme plus difficile et l’effort pour maintenir la motivation s’ajoutera à la mobilisation des ressources attentionnelles pour effectuer la tâche. Une motivation intrinsèque induit donc une meilleure capacité à maintenir une attention soutenue.

// Comment stimuler la motivation intrinsèque ?

Voici quelques idées pratiques suggérée par Aurélie Van Dijk, docteur en psychologie cognitive et experte en pédagogie :

  • Mettez en avant “le caractère utile d’un apprentissage”.
  • Donnez du sens aux apprentissages en explicitant le “pourquoi” et les bénéfices.
  • Donnez des feedback positifs, mettant en avant les progrès de l’apprenant. Demandez-lui de verbaliser ses réussites.
  • Donnez des exemples concrets d’applications des compétences et des savoirs à acquérir.
  • Proposez des activités surprenantes, atypiques, ludiques.

Capter et maintenir l’attention des apprenants

En plus des recommandations déjà énoncées, voici 3 conseils pour capter et maintenir l’attention de vos apprenants proposés par Stanislas Dehaene et Aurélie Van Dijk :

Stimulez le visuel ou mieux encore, le multisensoriel : associer une image à une explication favorise l’apprentissage. En utilisant un autre sens en complément de la stimulation visuelle, l’attention mobilisée par vos apprenants sera encore supérieure ! De plus, récupérer par la suite l’information mémorisée sera d’autant plus facilitée.

Je fais attention si tu fais attention : en présentiel, l’attitude du formateur, par le contact visuel et verbal, garantit que l’apprenant partage l’attention de celui-ci et multiplie d’autant les chances que les informations qui doivent être transmises soient retenues ! Des phrases telles que « j’attire votre attention sur… » ou « c’est un des éléments clés de ces deux jours de formation », etc. permettent aussi d’orienter l’attention.

// Comment utiliser le levier émotionnel pour capter l’attention ?

  • Créez la surprise en proposant une activité originale ou en variant les techniques pédagogiques.
  • Proposez des défis, des challenges ou des énigmes pour motiver vos apprenants.
  • Utilisez l’humour dans vos quiz avec des propositions décalées.
  • Racontez des anecdotes ou des blagues.
  • Proposez des jeux, utilisez le storytelling.
  • Utilisez des supports vidéo ou audio.
  • Faites décrire la météo intérieure des apprenants

Sources :

  1. Stanislas Dehaene “Apprendre ! les talents du cerveau, le défi des machines” Ed. Odile Jacob, 2018
  2. Donald A.Blight “what’s the use of lectures”, Jossey-Bass; 1st edition, 2000
  3. Vallerand et Thill, “ Introduction à la psychologie de la motivation”, Vigot,1993
  4. Mansy-Dannay, Annie & Alain, Guerrien. (2002). Motivation, sentiment de compétence, agrément et fatigue ressentie après la séance d’enseignement au collège. Revue de Psychologie de l’éducation. 7. 58-75.
  5. Aurélie Van Dijk, “Réinventez vos formations avec les neurosciences-Tout comprendre du cerveau et de l’apprentissage des adultes”,esf sciences humaines, 2019

Aurélie ZARA

DEA sciences cognitives / Formation Master 2 ingénierie pédagogique multimodale, Lille. Création d’un parcours digital sur les conditions d’apprentissage en formation chez XPERTEAM-EASY.